LA MAISON JANOTTE

Documents transmis par Pierrette Proulx et Jacques Lamer

Le plus vieux document que nous ayons concernant le lot 42, sur lequel fut bâtie la maison de Joseph Janotte, est celui de la vente par Antoine Janotte dit-Lachapelle et sa femme Anne Vaudrie. Ils habitaient la côte Saint-Léonard à Montréal.

Le contrat est passé devant le notaire MontMarquet le 3 octobre 1740. La vente est consentie à Pierre Janotte* pour son fils Joseph, âgé de 17ans.

L'acte de vente comprend, une partie de terre d’un et demi harpent par 30 arpents. Elle est située sur les bords de la rivière Chambly (Richelieu) dans le fief d’Hertel de Cournoyer, allant jusqu’aux terres non concédées (le second rang).

 Le prix de la vente est la somme de 225 livres. Cette terre est l’autre moitié de la terre appartenant à Pierre Janotte, voisin de celle de Jean Renaud (N.E.) et de Jean-Baptiste Janotte (S.E.) (frère de Pierre). Les témoins de l’acte sont Louis Filiatro et Athanase Gravelle, habitants de la côte Saint-Léonard.

Qui a fait bâtir la maison de pierres du lot 42? Pierre ou son fils Joseph? Les parents y vécurent jusqu’à leur mort soit 1760 pour Madeleine Aubuchon et 1763 pour Pierre Janotte.

Cependant, leur fils Joseph les suivra de peu en 1769 à l’âge de 46 ans et sa veuve Thérèse Guyon-Dutilly se remarie en 1775 avec Michel Quéret de Bellechasse.

En 1773, le fils Janotte, Joseph-Marie (1753-1833) épousait Anne Loiselle fille, de Toussaint dit Sinotte et Anne Hogue. Les époux avaient tous les deux 20 ans.

D'après les experts, il semble que la maison date des années 1740-50. Mais nous ne disposons d’aucun document attestant l’existence de la maison avant l’inventaire des biens fait après le décès d’Anne Loiselle, la femme du petit-fils de Pierre Janotte (Joseph-Marie).

L’inventaire est fait à l’intention des héritiers mineurs qui ont survécu aux quatorze enfants nés du couple soit Marguerite 10ans, JosephIII âgé de 7ans et Marie-Charles 4ans, par le notaire LeTestu en novembre 1794. Cet inventaire fait alors mention de plusieurs documents de concession (en 1730, 1740 et 1750) à Antoine Janotte, à Pierre et à son fils Joseph.

Cet inventaire* nous précise l’état de la maison de pierres où habitent le veuf Joseph-Marie Janotte(II) et ses trois orphelins. La maison de pierres (dimensions non précisées*) est couverte de bardeaux de cèdre avec une boulangerie (de vingt pieds carrés) attenante au bout de la maison. Le toit de la maison est en très mauvais état, précisent les deux estimateurs (Joseph Drolet et Charles Desautels). Un hangar de bois,une grange d'une superficie de cinquante-huit pieds par vingt-quatre pieds en madriers et poteaux de cèdre avec des portes ferrées.

 La grange est couverte en paille. Une étable d'une superficie de trente pieds par vingt pieds en poteaux de cèdre et madriers en bon état. Une autre étable de vingt pieds carrés à poteaux de cèdre et trois portes ferrées.

 Elle est aussi couverte en paille. Un petit bâtiment pour les oies et les poules couvert en planches avec une vieille charpente. Tous ces bâtiments renforcés en planches composent l’ensemble.

La terre elle-même est défrichée et mise en culture en entier, tandis que les terres du deuxième et troisième rang, bien qu’habitées et pourvues de bestiaux, sont partiellement en prairies. L’inventaire est très exhaustif en ce qui concerne les meubles, vêtements, outils agricoles et de menuiserie et autres bricoles qui constituent les biens de la communauté de mariage entre Anne Loiselle et Joseph-Marie Janotte(II), capitaine du roi.

LA CHAINE DE TRANSMISSION DE LA PROPRIÉTÉ

De Joseph-Marie Janotte(II), veuf et remarié en 1795 à Josephte Lévesque veuve Talard-Pinsonneau (dont il n’aura pas d’enfant), la terre et la maison de pierres passeront en 1809 au fils unique Joseph III, qui a épousé en 1807 Charlotte Marcil de Longueuil.

Les donateurs se réservent une partie de la maison de pierres pour y résider jusqu’à leur mort, qui surviendra pour Joseph-Marie en 1833, et sa veuve seulement en 1857.

Joseph JanotteIII et Charlotte Marcil auront seize enfants, dont huit fils (sept survivront) et huit filles.

L’aîné JosephIV (1812-1881) sera l’héritier du lot 42, de la maison de pierres et du titre de capitaine de milice. Il épousera Zoé Bernard-Brouillet à Beloeil en 1835. C’est lui qui rachètera les terres du seigneur Toussaint Drolet, échues à ses créanciers et vendues par sa veuve Sophie Boileau en 1844.

Quant aux autres fils de Joseph et de Charlotte, ils seront établis par leur père, les uns à Saint-Marc, les autres à Beloeil. Pierre-Paul  sera établi sur le lot 34 à Saint-Marc après avoir épousé Tarsile Beaudry, Michel-Sylvestre à Beloeil en épousant Marguerite Noiseux.

Marc vivra un mois à Beloeil avec sa nouvelle épousée Césarie Préfontaine avant de tomber sous les balles des soldats anglais à Saint-Charles en 1837; il est inhumé avec cinq autres insurgés dans le cimetière de Saint-Marc.

En 1851, Joseph Janotte III et Charlotte Marcil font donation (acte enregistré en 1856 par le notaire Charles Brin) à leur fils Joseph IV et à son épouse Zoé Bernard-Brouillet, d’un ensemble de terres situées en première, seconde et troisième concession. Les deux vieux époux mourront en 1863 et 1871.

Joseph(4), le dernier des Janotte à être capitaine de milice partagera ses possessions par testament en 1881 entre ses fils. Pantaléon héritera de la maison de pierres, du lot 42 et de l’île aux cerfs(ile Jeannotte?).

François-Xavier, curé, héritera avec son frère Adhémar, médecin, du lot 130 du second rang et ils vendront un an plus tard à Joseph Gatien. Quant à Jos.-Anaclet, il gardera la terre des 60 (lot 468) qu’il avait échangé quelque temps avant avec son père contre une forte somme d’argent et que sa veuve devra céder à Étienne Blanchard en 1885.

Pantaléon vivra avec ses enfants dans la maison ancestrale des Janotte qui passera à son fils Joseph à son décès vers 1927 et celui-ci sera le dernier des Janotte à habiter la maison du lot 42.

Puis, la maison de pierres passera entre des mains étrangères. Les futurs propriétaires sont le notaire Eugène Handfield en 1944, G.P. Boschi en 1954, B. Beauchemin en 1959, Andrée Larivière en 1961, Jacques Lamer en 1987, depuis 2004 Denis Ouellet.

*Pierre Janotte n’est pas venu seul de la Pointe-Aux-Trembles : quelques-uns de ses sept frères, Antoine, Laurent et Nicolas et plus tard Jean-Baptiste ont aussi reçu des concessions du fief Cournoyer. On retrouve également un beau-frère Jacques Senet époux de Marie Janotte et leur sœur Barbe Janotte qui participèrent à l’aventure du défrichement.

Pierre Janotte s’était marié en 1710 à la Pointe-Aux-Trembles avec Madeleine Aubuchon; on leur connaît deux fils installés sur le fief Cournoyer, Pierre et Joseph ainsi qu’une fille Marie-Josephte qui épousera François Desautels en 1742 à Saint-Charles, puis Pierre Robert en 1752.

Elle est l’aïeule de tous les Robert de Saint-Marc. Pierre fils n’a eu aucun enfant avec son épouse Elisa Foisy. Joseph épouse Marie-Thérèse Guyon-Dutilly en 1746 à Saint-Charles. Leur mère Madeleine Aubuchon décède en 1760 et est inhumée à Saint-Charles à l’âge de 76ans; le vieux Pierre Janotte vit encore à cette époque.

*L’inventaire de 1794 référait aussi à d’autres contrats d’achats de terre : à Louis Dutilly (lot 142) en 1764, de lots échangés au marchand Chauvin sur le bord de la rivière, de lots vendus aux Janotte par Gabriel Fontaine et ses héritiers en 1786 et 1790. Toutes ces terres sont déclarées mises en culture et des maisons et remises y sont érigées.

La famille Janotte possède plusieurs bœufs de labour, des moutons, des volailles et des vaches laitières. L’île Aux Cerfs (ile Jeannotte?) a aussi été concédée en 1764 à Joseph Janotte qui est capitaine de milice au moment de l’inventaire. Ce titre et la fonction seront transmis à son fils puis à son petit-fils.

*Dimensions de la maison spécifiées par la Société Mutuelle des incendies en 1893, soit trente-six pieds par trente pieds.

Recherches et rédaction : Nicole Lamarre

Dactylographie du texte : Marjolaine Racicot